Question:
L'assignation des "rôles" permet-elle d'anesthésier toute révolte?
yamaela
2011-10-18 18:19:48 UTC
"On donne à consommer de la Femme aux femmes, des Jeunes aux jeunes, et, dans cette émancipation formelle et narcissique, on réussit à conjurer leur libération réelle. Ou encore : en assignant les Jeunes à la Révolte ("Jeunes = Révolte") on fait d'une pierre deux coups : on conjure la révolte diffuse dans toute la société en l'affectant à une catégorie particulière, et on neutralise cette catégorie en la circonscrivant dans un rôle particulier : la révolte.

Admirable cercle vicieux de l'"émancipation" dirigée, qu'on retrouve pour la femme : en confondant la femme et la libération sexuelle, on les neutralise l'une par l'autre. La femme se "consomme" à travers la libération sexuelle, la libération sexuelle se "consomme" à travers la femme.

Ce n'est pas là un jeu de mots. Un des mécanismes fondamentaux de la consommation est cette autonomisation formelle de groupes, de classes, de castes (et de l'individu) à partir de et grâce à l'autonomisation formelle de systèmes de signes et de rôles."
Jean Baudrillard - 1929-2007 - La Société de consommation - Denoël - 1970, page 216

Cela m'a fait un bien fou de lire ça!
Huit réponses:
Franck Z
2011-10-19 05:45:36 UTC
Ca me fait penser au poème "Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage..." de du Bellay. Les Jeunes, la Révolte, les Femmes, la Libération sexuelle... on s'en enivre comme "des palais romains, les fronts audacieux." Mais, ça ne marche qu'un temps en fait. Il n'en reste pas moins les jeunes, la révolte, les femmes et la libération sexuelle de retour au "séjour qu'ont bâti (nos) aïeux".



Enfin, pour les jeunes, parfois c'est un peu tard... mais ce n'est pas si grave que ça, en fait. ;-)



Peut-être un jour regarderas-tu avec sympathie un titre comme "La philosophie pour les paresseuses" ?



(perso, je serai un peu triste : j'aime beaucoup la manière dont tu écris, ^o^)



@ Yamaela : c'est le mot "aïeux" qui doit m'avoir trahi... Par "séjour des aïeux", je ne voulais pas faire référence aux grands auteurs, mais à sa propre expérience à soi, où l'on continue de penser à la révolte et aux autres thèmes cités. Les grands auteurs (marketing) ce serait plutôt le premier mouvement du poème, avec Rome et ses palais.

Ainsi, par "paresseux", je ne voulais pas dire "se laisser séduire par un pensée célèbre", mais plus être au courant de ces pensées très formalisées tout en n'ayant plus assez d'énergie pour s'en enivrer, car on apprend avec le temps que c'est épuisant à la longue de nier son expérience à soi.

Par contre, je me suis effectivement contredit en écrivant que je serai triste : je serais triste seulement si Baudrillard avait raison te concernant, et que l'on disparaissait dès lors que l'on quitte l'ivresse du marketing dont sont victimes les grands auteurs. "Bah, non !" témoigne du Bellay !



@ Yamaela : Euh... Euh... Ca devient compliqué pour moi. ^o^

Si tu cites ce passage de Baudrillard, ce n'est pas parce que tu te sens prisonnière malgré toi des rôles que l'on t'assigne ? Dans le passage, il écrit aussi qu'on assigne un groupe (les jeunes) à la révolte. Donc pour lui, hors du groupe désigné, point de révolte encore possible, non ? Ca paraît excessif, quand même.
Têtaclic
2011-10-19 12:28:31 UTC
Merci Yamaela de vous soumettre à ce casting en vue de l' attribution d'un rôle qui pourrait éventuellement vous être assigné...celui d'une petite mécanique soumise écarquillant les yeux dans la salle de réveil de la clinique des révoltés et prête à une déprogrammation à casser la baraque..

Vous imaginez bien qu'il nous faudra dans ce cas prendre quelques précautions et nous assurer que votre talent de comédienne ne surjoue pas dangereusement ce rôle s'il s'avère être de composition..

Alors voyons votre cv.....serais-ce la encore un de ces rôle que l'on vous aurait assigné et qui vous collerait à la peau sans votre consentement...?



Féministe enragée..hummmm....Libre, libérée et libertaire... conchiant l'indifférence et les intolérances des chiants.. tout cela me parait pas mal...humm...prônant une délocalisation de la révolte jusqu’alors centralisée chez les jeunes..vers des succursales de proximité à vocation de liberté sexuelle telle que les maisons de retraite ou les agences de tourisme et de voyages organisés pour nos aînés fortunés ou sévit et gronde une révolte hors de tout soupçon..

Bref..il s'agirait d'une mission folle destinée à faire consommer... de la femme aux hommes... de la jeunesse au vieux... ce qui vous en conviendrez casse toutes les mécanisme et tous les schémas communément admis...

J'aime beaucoup c'que vous faite.. c'est trés courageux ..je vous confie ce rôle.. mais laissez moi jouer avec le mien..!..:-)
kath
2011-10-19 10:17:57 UTC
Non,je pense que cette réflexion bien que paraissant intéressante nous égare et nous éloigne d'une vision simple et claire du problème.

J'ai un ami qui appelait çà de la masturbation mentale.

Sans méchanceté.

La vérité réside dans les choses simples,à mon avis.



Je pense qu'il y a un manque de sagesse et de cohérence dans la gestion de notre société.

La mal- consommation et la négation de la réalité me semblent être les vrais outils pour étouffer les révoltes.



Je pense qu'au contraire enfermer les personnes dans des catégories alimente l'évolution vers une révolte.

Parce que dans un circuit fermé on arrive vite au terme du système et le changement se produit inéluctablement,justement.



Rajout:

Bonjour,merci pour tes détails supplémentaires.

J'y ai re réfléchis et je continue à ne pas orienter ma réflexion dans le même sens que toi.

çà ne veux pas dire que j'ai raison,simplement ce n'est pas du tout mon analyse.

Je pense que les gens ont des besoins et qu'on les égare souvent quant à leurs réels besoin et leurs devoirs,justement à cause de la consommation.

Le temps qu'ils courent après çà,ils brûlent leur énergie de révolte.

Je ne suis ni de droite,ni de gauche.
Freedom
2011-10-19 08:29:50 UTC
Par rapport à ta réponse à la question qui a inspiré la tienne: le fait d'être conscient des mécanismes et de ne PAS agir est un des objectifs de ces fameux mécanismes, et le fait de tomber dedans quand même me sidérera toujours.



J'ai une admiration sans bornes pour ces indignés qui se font passer pour des utopistes folkloriques farfelus mais qui le font quand même. J'y vois avec les émeutes de Londres les premiers actes concrets de "conscientisation".



Comme je le dis souvent, il faut malheureusement toujours attendre que le confort nous quitte avant de se dire que le "tiens, c'est pas juste ça?" que l'on pense depuis des années débouchent sur des actions concrètes.



Subir? Volontairement. On te tient par ton confort que tu ne veux pas perdre. Tu (tout le monde) as troqué ta liberté contre ce confort qui te culpabilise et te rend fataliste.



Il y a une chose sur lequel je suis certain: ce sera cette perte de confort qui tient les esprits liée à une association massive (jamais vu) de citoyens qui verra se bouleverser l'Europe et par là même le monde.
Anastasia
2011-10-19 20:04:50 UTC
Je considère cela comme de l'analyse au petit pied. Du niveau des intellectuels français, c'est à dire en radada. Les rôles, si rôles il y a, sont assignés par l'éducation reçue relative aux groupes sociaux auxquels nous sommes affiliés. Autant dire que l'utilisation mercatique de quelques termes de ci de là ne présente qu'un poids ridicule face aux apprentissages qui sont intégrés par des années d'immersion dans une culture particulière.



Autrement dit, encore un pseudo intellectuel qui prend ses prochains (et ses lecteurs à l'occasion) pour des imbéciles (et je reste mesurée dans mes termes).



A comparer avec cela :





L'amour est le moyen et l'expression de la relation et de la dépendance réciproques entre les êtres humains, de cette relativité en vertu de laquelle la satisfaction des désirs de l'un est toujours liée à l'autre et vice-versa.



C'est pourquoi il ne trouve pas sa place là où ne s'exerce pas cette relativité, soit qu'on ne désire plus rien de ses congénères, soit qu'on les surplombe d'une hauteur absolue, en l'absence de toute relation avec eux, si bien qu'on peut obtenir sans contrepartie la satisfaction de tous ses désirs.



Un tantinet plus touffu, n'est-il pas ?





En fait ce paragraphe est piégé, j'ai perverti le sens du texte en changeant un seul mot. A vous de deviner lequel (facile) et de le remplacer par celui qui convient (très facile).





Voui, c'est cela. Georg Simmel, Philosophie de l'Argent.
?
2011-10-19 09:30:13 UTC
.





Diviser pour mieux régner.



Les premiers de la classe font de bons préfets....!



Quant à la " pseudo " libération de la femme , j'en ai beaucoup entendu parler



Mais j'ai pas beaucoup vu dans les actes...!



timinet
2011-10-19 06:14:35 UTC
D'où l'indifférence,la haine pour l'une ou l'autre catégorie, le manque de cohésion dans l'action ,le manque de solidarité , l'échec partiel du syndicalisme ...et le désespoir actuel...C'est effectivement une action insidieuse d'étouffement, commencée au lendemain de 68 ...

C'est vrai qu'il vaut mieux savoir d'où vient notre maladie, mais cela ne nous guérit pas pour autant.

Personnellement ça ne me fait pas de bien du tout ça m'exaspère.
maricimaraj
2011-10-19 17:56:01 UTC
content de voir que tu vas mieux ...

tu dis que ça t'a fait un bien fou, c'est vrai! ce qui nous fait du bien nous rend meilleur !

je sais, ça a rien à voir avec la question, c'est juste pour dire bonjour ...

sourires et paix !


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